TARAF DE HAÏDOUKS, Of lovers, gamblers and parachute skirts, Crammed
Voici le dernier album du Taraf de Haïdouks, le plus célèbre des groupes de musique tsigane rom. Nous avons eu le bonheur de le voir sur scène plusieurs fois – et de danser sur leurs formidables musiques faites pour … faire la fête !!!
Le groupe, qui célèbre son 25ème anniversaire, a perdu quelques aînés – Ion Manole, Neculae Neacsu, Ilie Iorgal,… – mais l’esprit de cette formation demeure, qui perpétue les musiques des «lautare», ces musiciens tsiganes qui louaient leurs services pour les fêtes comme on embaucherait aujourd’hui un DJ pour un mariage.
Le mot roumain «lautare» vient très certainement du latin «laudare», qui signifie «louer» : les lautare étaient donc les griots roumains, sur un modèle que l’on trouve en Afrique également, c’est-à-dire musiciens professionnels de père en fils, caste à part, située au plus bas de l’échelle sociale, mais qui remplissait un rôle-clé dans la société : la divertir, la faire chanter, danser et rire.
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Oui oui, ce sont bien les cousins des misérables roms que l’on croise dans le métro parisien, aujourd’hui réduits à la mendicité… précisément parce que des machines – tourne-disques, lecteurs de cd, puis ordinateurs – ont remplacé des humains pour divertir les foules et apporter un peu de joie aux coeurs…
Nous sommes totalement fans des musiques tsiganes d’Europe de l’Est, mélange total d’Occident – dans la vitalité des danses, et le fait même de danser hommes et femmes ensemble – et d’Orient, dans l’emprunt de certains rythmes ondulants et de manières de moduler la voix.
Le livret est accompagné du résumé des titres, ce qui est toujours nécessaire pour comprendre l’esprit d’une chanson. Et c’est sans doute ce peuple gai et non matérialiste qui inspira à La Fontaine – et à Esope avant lui – sa fable de «La cigale et la fourmi» (les pauvres fourmis, c’est nous, sociétés occidentales modernes, où la valeur travail – c’est-à-dire argent – domine tout…) .
Et l’humour est au rendez-vous, avec une chanson comme «Je vais vous raconter comment c’est dans l’autre monde» :
«J’ai fait semblant de mourir pour voir comment c’est…
Mon amante y était jugée par le Diable en personne.
Ma femme me questionnait, me sommait de jurer sur la croix
Que je ne l’avais pas trompée… et je n’ai pas juré !
J’aime les jolies femmes, particulièrement
Quand elles appartiennent à un autre.
J’ai fait semblant de mourir pour voir qui me pleurerait.
Et j’ai vu que mes ennemis riaient
Et que seule la moitié de mes amantes pleuraient…»
Et bien, dansons maintenant !