Le monde en musiques

FRANCE-ESPAGNE-MATTHIEU SAGLIO & CAMILLE SAGLIO

Matthieu Saglio & Camille Saglio, « MATTHIEU SAGLIO & CAMILLE SAGLIO, « Al Alba » (ACT, 2025)


Nous sommes une fan inconditionnelle du violoncelliste Matthieu Saglio, que nous suivons avec passion depuis ses débuts. 

Formé au classique (au Conservatoire de Rennes), Matthieu vit depuis 20 ans à Valencia en Espagne, et s’est donné comme mission de « faire dialoguer son instrument avec d’autres cultures ». Flamenco, kora, chant arabe, pour ne citer que ces univers-là, l’instrumentiste et compositeur s’épanouit en découvrant et en se fondant dans d’autres univers musicaux.

C’est un duo violoncelle-voix qu’il nous propose ici, accompagné de son frère Camille, et avec une participation d’un autre frère, Gabriel, sur l’une de ses compositions. Car à part trois titres (sur 14), l’ensemble du disque est composé par Matthieu. Et – comme d’habitude quand nous recevons un CD de Matthieu Saglio avons-nous eu envie d’écrire … – nous avons été enthousiasmée ! 

Camille, qui a débuté l’apprentissage du chant à l’âge de 12 ans, partage la même curiosité musicale que son frère, et au cours de sa carrière, a pareillement exploré les terres les plus diverses et lointaines. Dans ses projets précédents, il chantait en arabe, en turc, en bambara ou en diolla, qui est un dialecte africain. 

Unis, les deux frères nous font voyager, dans des contrées géographiques ou bien issues de leur pure imagination (quand Camille chante dans une langue imaginaire). « Derviche » évoque le Moyen-Orient, Turquie ou monde arabe ; « Ginkgo Biloba », où le violoncelle imite le son de la kora, joué en pizzicato, est chanté dans une langue africaine, réelle ou imaginaire ; dans « Strange Fruit », standard du jazz que magnifia Billie Holiday, Matthieu fait sonner son violoncelle, toujours en pizzicato, comme un banjo ! ; dans « Tariq », qui veut dire « chemin » en arabe, Camille chante en arabe, avec une prononciation excellente (je suis libanaise et donc arabisante), même en prononçant ce HH guttural typique de cette langue. 

Mais ce qui nous a le plus séduit dans l’album, et qui donne sa couleur à l’ensemble, est cette voix telle celle d’un haute-contre qu’adopte Camille dans bien des titres, comme dans « Amelui ». Unie au violoncelle de Matthieu, plutôt dans les sons graves, ce mariage du très-bas et du très-haut nous emporte et nous élève… très haut, dans un registre spirituel.

Comme si un musicien de l’époque baroque en Europe, Purcell, Haendel, ou autre, prenait la route pour l’Orient, l’Afrique, ou des contrées imaginaires, et rencontrait en chemin des musiciens avec lesquels il chanterait. La musique baroque fait la part belle au sacré, les cultures traditionnelles aussi, et c’est là le point de rencontre – et de dialogue – qui crée ce miracle de musique. Bravo Matthieu, bravo Camille, clin d’oeil à Gabriel aussi ! 

Nos articles sur ses albums précédents ici : https://muzzika.fr/?s=saglio

matsag.comassoayana.fr/camille-et-matthieu-saglio/actmusic.com