CAMEROUN : ROLAND TCHAKOUNTÉ, Le blues comme identité

Roland Tchakounté

Le dernier album du bluesman Roland Tchakounté, comme ses précédents, est une vrai réussite. L’ouverture de ce disque dit tout : cela démarre comme une balade mandingue, rythme lent et balancé venant tout droit des déserts du Mali, et se transforme peu à peu en blues du Mississipi, au son si typique. Roland Tchakounté est Camerounais. Et il aime le blues. Non : il a une PASSION pour le blues. Et encore mieux : le blues est son identité, son langage, son univers, son mode d’expression.

Bref, Roland Tchakounté est un pur bluesman. Cela ne se décrète pas, ne se choisit pas : on est bluesman ou on ne l’est pas. Ça n’est pas une question de technique, maîtriser tels et tels accords de guitare, tels rythmes (très simples au fond). Non, le blues vient du coeur.

Et c’est cela qui s’ENTEND, dans l’album – sans comprendre un traître mot de bamiléké, sa langue natale, dans laquelle s’exprime l’artiste. L’album se déroule, et on le ressent : c’est son coeur qui parle dans ces cordes qu’il fait pleurer mais aussi vivre comme tout vrai bluesman.

Car le génie du blues est de transformer la tristesse en énergie de vie. Et dans un entretien à notre confrère Francis Rateau il y a quelques années, l’artiste s’en expliquait : «J’ai été élevé dans la philosophie humaniste africaine basée sur la recherche du bien de l’autre. Cette philosophie peut se résumer par la phrase bamiléké «me bah wu», qui signifie «je suis toi». Ainsi, considérer l’autre comme étant vous-même vous enlève toute envie de lui faire du mal et vous incite à ne souhaiter que son bien».

Roland Tchakounté n’est donc pas bluesman par tristesse, mais au contraire, pour guérir celles des autres, comme il s’en explique : «Pour un artiste d’origine africaine, chanter, c’est militer pour que l’amour et l’espoir, des valeurs auxquelles je suis très attaché, priment sur la haine et sur le désespoir. C’est lutter pour que la frustration ne soit pas la seule soupape de sécurité des gens blessés par la vie».

Et le titre même de l’album le dit : «Nguémé» signifie «épreuve» au Cameroun – traduction donc : «le blues souriant malgré les épreuves». L’une des plus belles chansons du disque, portée par des choeurs féminins, dans la pure tradition africaine, s’appelle ainsi «Nju Bwoh Man», qui veut dire «La vie est belle». Roland Tchakounté, un grand musicien, un homme au coeur plus grand encore… Un album splendide.

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