ALGERIE,EQUATEUR . SARAZINO, Cumbancha

SARAZINO, Cumbancha
Sarazino est un artiste algérien qui a choisi de vivre à Quito, en Equateur, car il est tombé amoureux des musiques d’Amérique latine, et, surtout, de l’atmosphère de dynamisme et de volonté de changement qui y règne en ce moment, comme il l’explique à propos de sa chanson “Cochabamba”, qui est “un hommage aux dynamiques politiques et sociales de l’Amérique latine, où le désir de créer un monde meilleur apporte de l’air frais au désir révolutionnaire de transformation”.

          Et l’histoire de ce cd ressemble à un conte de fées: Sarazino – de son vrai nom Lamine Fellah – est né à Constantine en 1970 dans une famille dont le père est diplomate (et qui sera assassiné par les islamistes en 1993), et il a vécu dans plusieurs pays d’Afrique et d’Europe dans sa jeunesse, avant de s’installer à Montréal pour suivre des études de sciences politiques, qu’il abandonne pour créer son groupe, Sarazino, dont le premier album ne connaît pas le succès escompté. Mais en 1996, Lamine découvre l’Equateur, et c’est le coup de foudre: il s’y installe, et y sort bientôt son deuxième album, Mundo Babylon, sous un label équatorien.

         C’est alors qu’Edgar Jacob, le dénicheur de talents du label américain Putumayo, l’entend, et inclut deux de ses titres dans des compilations Putumayo: “World Party” et “Latin Reggae”. Puis Edgar Jacob crée le label Cumbancha, dédié à des monographies d’artistes, et lui offre de publier son troisième album: Jacob adore les mélanges de musiques – qui fondent le label Putumayo – et est séduit chez Sarazino par ce mélange de musiques latino-américaines, africaines, arabes, reggae, hip-hop, etc… Voici donc un album festif avant tout, dont chaque titre est à danser, comme la plupart des chansons latino-américaines.

         Le reggae y occupe une grande place, une partie de l’album a été enregistrée en Jamaïque, et sur “Ecos de Radio Iguana” on a même convié Toots Hibbert, le chanteur du groupe jamaïcain Toots & the Maytals.“Ya foy” veut dire “nous voilà” en baoulé, et sur l’album on entend le chanteur béninois Revelino Aguidissou, qui chante à la manière des griots d’Afrique de l’Ouest, et qui s’est lui aussi installé à Quito ! La chanson d’amour “Nadia”, chantée en espagnol, convoque la guitare espagnole (ou oranaise? ou constantinoise?…), et joue sur ces variations sur une même voyelle et plusieurs notes – eeeaaaooo – rendues célèbres par Enrico Macias, et qui sont caractéristiques aussi du chant gitan flamenco.

         Et l’on notera, sans commentaires, que les deux seuls prénoms féminins mentionnés dans les chansons d’amour sont des prénoms arabes: Nadia et Leila (dans “Quien era Leila?”): atavisme, quand tu nous tiens… Au total un album plein de bonne humeur, un album très urbain aussi, avec la place faite au reggae, au rap et au hip hop, et qui reflète toute la jeunesse et la vitalité d’un continent latino-américain qui, fait unique dans le monde, sait marier un goût immodéré pour la fiesta, la musique et la danse, à une conscience politique aigüe – les unes étant au service des autres, et vice-versa… Et ça marche, comme le Brésil en témoigne ces dernières années, et sans doute l’Equateur, dont nous entendons moins parler dans les médias…
www.cumbancha.com/sarazino
Ecouter des extraits: http://www.amazon.fr/s/ref=sarazino