SÉNÉGAL-FRANCE : ABLAYE CISSOKO & CYRIL BROTTO, « Instant » (Ma case/Absilon)

Nous adorons la kora et nous adorons l’accordéon – dont le bandonéon est cousin –  et avons été totalement sous le charme de cet album, qui nous prouve une fois de plus que toutes les musiques et tous les instruments peuvent se mêler harmonieusement. 

« Comme si Amélie Poulain nous envoyait une carte postale du Sénégal », nous suggèrent les artistes. Car la rencontre entre le Sénégalais Ablaye Cissoko et le Français Cyrille Brotto est un vrai régal. Nous avions déjà eu la rencontre kora-violoncelle, avec Ballaké Cissoko et Vincent Segal au violoncelle ; kora-harpe, avec Seckou Keita et Catrin Finch ; voici donc un nouveau duo qui voit le jour : kora-bandonéon.

Ecouter : https://www.youtube.com/watch?v=UgEKTgOrT78

Et ce qui est émouvant ici, est que chacun de ces instruments peut être considéré comme l’instrument-symbole des musiques populaires dans son pays. Ainsi la kora est traditionnellement jouée par les griots, qui sont les musiciens ambulants d’Afrique de l’Ouest, à l’image des guitaristes croisés dans le Nordeste du Brésil : ils improvisent des chansons, accompagnés de leur instrument, et y font l’éloge de celui qui les écoute… et qui les paye pour cela ! Les griots animent ainsi les fêtes publiques et privées : mariages, baptêmes, circoncisions, aussi bien dans les pays du Sahel qu’en France dans la diaspora africaine. 

Quant au bandonéon, c’est un cousin de l’accordéon, roi des bals populaires en France autrefois comme on sait, à l’époque glorieuse des Gus Viseur et autres Marcel Azzola. Et il demeure à nos yeux, de Libanaise-et-Française de double culture, le symbole des musiques populaires françaises, que les plus grands artistes de la chanson ont sollicité sur scène, de Jacques Brel (avec son célèbre « chauffe Marcel » adressé à Marcel Azzola) à Nougaro qui s’accompagnait presque toujours de son ami l’accordéoniste Richard Galliano sur scène. (Et notons que le bandonéon est devenu aujourd’hui l’instrument-symbole des musiques argentines, l’accordéon et tous ses cousins ayant été apportés avec eux par les émigrants partis d’Europe pour l’Argentine au XIXème siècle. C’est par exemple l’instrument du tango…). 

Ablaye Cissoko fait ici comme tous les griots : il chante tout en jouant, et l’ensemble musique et voix est d’une douceur incomparable, douceur des musiques mandingues… Et le bandonéon de Cyrille Brotto devient comme un souffle, une respiration, même douceur dans le son, la mélodie de l’accordéon apportant une ligne sur laquelle le chant de la voix et de la kora peuvent s’appuyer. 

Un délice d’album, et un duo à qui nous souhaitons longue vie ! 

ablaye-cissoko.com