
Nous avions découvert Carla Pires en 2012 et avions été conquise par sa manière d’interpréter le fado, avec douceur et sans tragique, comme une douce balade qui fait du bien… (https://www.babelmed.net/article/2062-carla-pires-rota-das-paixoes/ ).
La voici de retour, fidèle à elle-même, avec un album où l’artiste magnifie le fado, tout en se l’appropriant de manière tout à fait personnelle. Interludes d’une guitare portugaise à la fois douce et virtuose, une voix qui sait se faire expressive sans verser dans un pathos inutile, des rythmes neufs qui viennent réveiller ce fado enraciné – comme dans le titre-phare, « Cartografado », où l’entend les rythmes syncopés venus d’un Cap-Vert que conquirent les Portugais jadis… « Ha um sabor tropical » – « le fado a une saveur tropicale » nous chante d’ailleurs l’artiste sur ce titre…
Ecouter : youtu.be/0byAaq8wpfc
« Ta bouche aux lèvres d’or » : Carla Pires nous fait même la surprise de nous offrir une chanson en français – paroles de Paul Eluard : « Ta bouche aux lèvres d’or n’est pas en moi pour rire/Et tes mots d’auréole ont un sens si parfait/Que dans mes nuits d’années, de jeunesse et de mort/J’entends vibrer ta voix dans tous les bruits du monde… » : ouf ! il reste encore des régions d’Europe où la poésie vit encore, c’est-à-dire où l’on aime encore l’entendre, et la chanter… Car en France, il faut bien le dire, depuis la disparition de nos Ferré, Barbara, Brassens ou Brel, la poésie a presque totalement disparu de notre quotidien.
Vive donc le Portugal – mais aussi la Grèce par exemple – pays européens du Sud où, sans doute parce qu’ils sont moins industrialisés que l’Europe du Nord, l’on sait encore prendre le temps de vivre, et donc d’être sensibles à la parole poétique…
Nadia Khouri-Dagher